Le bon grain du poivre
Publié le
Les poivres offrent une belle palette de saveurs plus ou moins chaudes, plus ou moins fruitées. Le noir est incontestablement le plus puissant.
PAR ANIE CARLO
Le poivrier est une plante grimpante originaire de la côte de Malabar en Inde et les romains furent les premiers à rapporter son précieux fruit. De l'or en grain, la première épice connue en Occident, qui, jusqu'au Moyen Âge, faisait souvent office de monnaie et payait les dots, taxes et autres rentes. Le poivre demeure longtemps la spécialité de l'Asie. Pierre Poivre (sic), introduit la culture du piper nigrum dans l'île Bourbon, qui deviendra La Réunion, vers 1770. Après, le poivrier s'installe dans d'autres zones tropicales : la Malaisie, Bornéo, Sumatra, Sri Lanka puis prend aussi des couleurs en Afrique et au Brésil.
Bien que les variétés et les origines soient nombreuses, le poivre, le vrai, se décline en seulement trois tons et ses saveurs sont étonnamment différentes. Le noir est le plus piquant, le plus musclé. La baie est cueillie à peine rouge, donc avant totale maturité ; c'est après séchage au soleil pendant huit jours qu'elle devient couleur ébène.
Bizarre mais vrai, le blanc, acre et fruité, est cueilli bien rouge. La baie a été plongée dans de l'eau salée pendant une semaine pour la déshabiller de sa coque puis séchée au soleil. Enfin, le vert, moins piquant mais plus fruité, est ramassé avant d'être mûr. Il faut savoir que le poivre gris, proposé moulu, est simplement un mélange de noir et de blanc. Viennent après les faux poivres.
"Faux frères"
En France, note le Larousse des produits du marché, seul le piper nigrum a légalement droit à l’appellation poivre. Pour les différencier, les "faux frères" sont dotés d'un qualificatif.
Il y a donc le poivre Cayenne - il s'agit en fait d'un piment, le poivre rose ou d'Amérique, une baies à la bonne mine mais peu aromatique, qui ressemble au poivre mais n'a pas sa saveur chaude. Il faut encore noter celui du Sichuan qui, selon Épices et condiment (Larousse), est le fruit d'un frêne épineux qui pousse en Chine. Ce qui ne l'empêche pas d'offrir un arôme complexe des plus intéressantes : anisé, piquant avec une touche citronnée. Il est présent dans les préparations chinoises aux cinq épices.
Pour découvrir les poivres en grains (oubliez le poivre déjà moulu, rien ne vaut un tour de moulin pour réchauffer une préparation et ce ne sont pas les cuisiniers qui vous diront le contraire), investissez le royaume de Goumanyat.
Dans cette petite boutique voisine du Théâtre de la Michodière, Jean-Marie Thiercelin, qui ne choisit que la meilleure qualité, vous le fera tous découvrir en les humant.
L'un des plus prisés est le Sarawak, un noir de Malaisie savoureux aux odeurs de mus : "On a l'impression de se retrouver en pleine forêt" dixit Jean-Marie Thiercelin. Le blanc d'Indonésie, acre et piquant est aussi très apprécié. A chaque poivre son moulin et ici vous trouverez des moulins efficaces (Peugeot), en noyer clair ou foncé, en plastique transparent en version mini ou géante.
Enfin chez Izraël, il y a tant de poivres que de casseroles dans une cuisine. Un fleuri du Vietnam ou d'Indonésie, blanc de Malaisie parfumé et goûteux, vert frais du Brésil, un long ou à queue d'Indonésie, la maniguette, ou graine de paradis doux et fleuri (provisoirement en rupture de stock), ou le grain noir de la Jamaïque qui offre un bouquet fleurant girofle, cannelle, muscade, gingembre, en un seul grain. Celui-ci décontenance le goûteur. On dirai un grain de genièvre, dit François Izraël.
NOTE : Depuis 2002, la boutique Thiercelin "Goumanyat", loge au 3 rue Charles-François Dupuis, 75003 Paris.
Faites tourner
- Tags: La Presse en parle…, Le Figaro