Zoom sur la CANNELLE et la CASSE
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Quelques mots d’histoire
La cannelle est une épice connue depuis la plus haute Antiquité. On la trouve mentionnée dans la Bible, mais aussi dans la pharmacopée chinoise, il y a près de 5 000 ans. Elle provenait de l’Inde, d’où elle était acheminée par mer et par caravanes vers la Grèce et l’Empire Romain. Au XVIème siècle, les Portugais en avait le monopole, mais ils le perdirent au milieu du XVIIème siècle au profit des Hollandais. À la fin du XVIIème siècle, les Anglais, en soumettant Ceylan (Sri Lanka), mirent fin à la législation très répressive sur le trafic de l’épice. En effet, les Hollandais, pour protéger leur monopole, n’hésitaient pas à punir de mort quiconque était pris pour le vol d’une branche de cannelier.
Généralités et aspect botanique
Il existe de nombreuses espèces de canneliers, parmi lesquelles deux sont surtout cultivées pour la commercialisation : la cannelle de Ceylan et celle de Chine ou casse.
Le cannelier de Ceylan, Cinnamomum zeylanicum Nees, originaire de Sri Lanka est un arbre d’une dizaine de mètres qui pousse à l’état sauvage en Inde et en Malaisie. Il est également cultivé à Madagascar, aux Seychelles et au Ghana. Il possède de petites fleurs blanches et des feuilles persistantes ovales d’une quinzaine de centimètres. L’épice, cannelle de Ceylan, la plus appréciée sur les marchés, correspond à la mince écorce des jeunes tiges, que l’on détache par incision et que l’on découpe en lanières de 30 cm de long. Ces écorces, de couleur marron clair, sont ensuite séchées pendant un à deux jours, puis grattées pour en éliminer le liège. Par la suite, elles sont coupées en tronçons de longueur déterminée avant de poursuivre le séchage au soleil. Elles s’enroulent alors sous forme de tuyaux qui s’emboîtent les uns dans les autres. Dans les nouvelles plantations, la première récolte se fait au bout de cinq ans, puis tous les deux ans, à la saison des pluies, quand l’écorce est gorgée de sève, ce qui facilite le décorticage des tiges. La qualité de l’épice dépend de l’âge du cannelier et des techniques culturales, de la récolte et du soin apporté à la préparation et au séchage. Le cannelier de Chine, Cinnamomum cassia Blume ou Cinnamomum obtusifolium var. Cassia, est un arbre originaire du nord et du centre du Viêt Nam (Tonkin et Annam). Il est cultivé dans les provinces méridionales de la Chine. Il fournit une écorce épaisse et rugueuse dont la face externe est encore pourvue de liège avec les cicatrices des points d’insertion des feuilles. L’épice, moins prisée que la cannelle de Ceylan, se présente sous forme de tuyaux de 20 à 30 cm de long et parfois sous forme de morceaux de couleur brun roux.
Production de l’épice dans le monde : quelques chiffres
Lorsque l’on pense à la cannelle, on fait souvent référence à celle de Ceylan (Sri Lanka), qui, de très bonne qualité, est la plus douce.
Mais la production ne suivant pas la demande et les prix augmentant, elle a été remplacée par des cannelles cultivées en Indonésie. Les variétés Padang sont plus fortes en parfum et leur aspect est celui de bâtons plus épais.
Enfin, la casse a pour origine la Chine et est constitué de tuyaux et de morceaux d’écorce plus ou moins épais.
La composition de l’épice
La composition de l’épice dépend de l’espèce dont elle est issue, des pratiques culturales, des modes de récoltes et des traitements, en particulier des techniques de séchage. Les écorces de la cannelle de Sri Lanka contiennent 0,5 à 2,5 % d’huile essentielle. Le principal constituant de cette huile est le cinnamaldéhyde, responsable de la note typique de cannelle, auquel sont associées de petites quantités de linalol (note florale correspondant à celle de la graine de coriandre) et d’eugénol (note de clou de girofle). Les feuilles de ce cannelier, assez riches en eugénol et très pauvres en cinnamaldéhyde, sont extraites pour une utilisation en parfumerie. Quant à la cannelle de Chine, elle contient de 1 à 4 % d’huile essentielle très riche en cinnamaldéhyde ; elle est dépourvue de linalol et d’eugénol. Elle peut également contenir entre 1 et 8 % de coumarine, composé toxique, qui pose problème. Une autre variété de cannelle, Cinnamomum burmannii Blume, connue comme cannelle ou casse de Padang, assez pauvre en huile essentielle, contient également mais en moindre quantité de la coumarine ; elle est vendue à bon marché sous forme de poudre aux Etats-Unis.
Propriétés de l'épice
La cannelle est considérée comme une épice facilitant les digestions. Elle réduit les troubles digestifs, comme les flatulences. Elle possède également des propriétés anti-oxydantes intéressantes et une activité antimicrobienne. Toutefois, il est recommandé de ne pas trop en abuser et de ne pas en surdoser l’emploi, car prise en trop grandes quantités, elle peut provoquer des vomissements. Des allergies au cinnamaldéhyde ont été signalées, occasionnant des dermatites chez certains pâtissiers.
Test olfactif et gustatif
Pour ce test, prendre un morceau de tuyau de cannelle et le réduire en poudre dans un mortier. Ensuite, mettre une très faible quantité de cette poudre dans une petite cuillère et l’introduire dans la bouche tout en maintenant le nez pincé.
Avec la cannelle de Sri Lanka (Ceylan), on perçoit en bouche une agréable saveur légèrement sucrée et une sensation de piquant. Quand on relâche le pincement du nez, apparaît la note chaude et épicée typique de la cannelle, due au cinnamaldéhyde, avec des notes florales attribuables au linalol et une autre note du type clou de girofle liée à la présence d’eugénol. Après un petit laps de temps, une note boisée se développe.
Puis, lorsque le pincement du nez est relâché, un arôme puissant boisé de cannelle apparaît sans les notes florales et de clou de girofle. Il est bien moins fin que l’arôme de cannelle de Sri Lanka
Qu'est-ce qu'une bonne épice ? Comment la conserver ?
La meilleure qualité de la cannelle de Sri Lanka correspond à des tuyaux inférieurs à 2 mm d’épaisseur, l’optimum étant caractérisé par des tuyaux de 0,5 mm d’épaisseur. La couleur des tuyaux doit être d’un beau brun clair. Les tuyaux brisés et les morceaux d’écorce ou copeaux sont généralement transformés en poudre, laquelle présente l’inconvénient de perdre rapidement sa puissance aromatique. D’une manière générale, plus la taille des particules de la poudre est petite, plus les échanges avec l’atmosphère ambiante sont favorisés, ce qui entraîne une désaromatisation rapide de la poudre.
Comme pour la plupart des épices, la meilleure façon de conserver la cannelle pendant deux à trois ans est de la mettre dans des récipients clos, opaques à la lumière et étanches à l’humidité.
Les utilisations de l‘épice
La cannelle est utilisée aussi bien dans les préparations salées que dans les desserts et les boissons telles que vins chauds, chocolats chauds et punchs. Elle entre dans la préparation de nombreux mélanges d’épices, comme
le ras el-hanout, le garam masala, les curries. Ses extraits, en particulier ses huiles essentielles, sont un des ingrédients de formules aromatiques pour boissons, comme le coca cola, et pour pâtisseries et confiseries. N’oublions pas de mentionner l’utilisation des huiles essentielles de cannelle dans la confection de nombreux parfums.
Le point de vue des acheteurs
Chaque type de cannelle présente des caractéristiques physiques distinctes qui permettent de facilement les distinguer.
a.VOIR : L’observation attentive du produit proposé permettra facilement d’identifier de quelle cannelle il s’agit. Plus les tuyaux sont entiers et l’écorce fine, meilleure est la qualité de la cannelle de Ceylan. Quant à la poudre, celle-ci doit être homogène, fine et de belle couleur ocre.
b. SENTIR : L’odeur doit être caractéristique mais pas agressive. Pour la cannelle casse, il faudra gratter l’écorce avec une pointe de couteau pour sentir le parfum dégagé.
c. GOÛTER : Encore une fois, une cannelle de qualité est douce. C’était le sucre du Moyen-Âge, comme le montre nombre de recettes de gâteaux.X
Article réalisé par Professeur Hubert Richard et Jean Thiercelin